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Entretien | Jean-Christophe Spinosi va diriger « L’italienne à Alger » de Rossini aux Nuits musicales d’Uzès

14 Juin 2022 | Festivals, Gard, Musique classique & lyrique, Musiques

« Il faut avoir le duende musical avec Rossini et beaucoup de fureur, pour déclencher autant de sourires et d’amour. »

Ce sera un très grand moment que la soirée Rossini pour une œuvre des plus exquises, L’Italienne à Alger, dans laquelle la virtuosité de l’écriture vocale et orchestrale est un étourdissement pour les sens. Jean-Christophe Spinosi en a donné la preuve dans la magnifique direction de l’œuvre, au festival de Salzbourg en 2018. Il a accepté de parler de son travail, de ce métier passionnant de directeur, et de ce retour à Uzès, une ville qu’il affectionne.

Vous étiez l’an dernier, pour la 50ᵉ édition, dans la Cour du Duché ?

Oui, c’était pour trois œuvres de Beethoven, la sonate Appassionata, l’Ouverture symphonique de Coriolan, le Concerto l’Empereur, un concert qui signait une belle illustration du style héroïque de la musique de ce grand compositeur, en partie inspiré par les conflits qui ont embrasé l’Europe au début du XIXᵉ siècle.

Vous revenez cet été pour diriger cette grande œuvre de Rossini, un opéra buffa en deux actes, libretto di Angelo Anelli (1813), la version concert qui dure 2h40.

Oui, j’adore Rossini. J’ai dirigé dans plusieurs endroits magnifiques de nombreux opéras de Rossini, à Salzbourg, à Vienne, quatre avec Cécilia Bartoli à la distribution, mais c’est aussi pour moi une fête de revenir à Uzès invité par Eric Desnoues dont j’apprécie le goût et la passion de transmettre avec cœur et esprit, d’inscrire du sens dans tout ce qu’il fait. Je suis aussi heureux de revenir pour cet opéra qui est un des plus drôles, écrit dans une musique fantastique, une œuvre à l’action échevelée qui dégage une énergie incroyable. C’est, selon moi, l’œuvre idéale. 

Vous annoncez un changement dans la distribution. Anna Goryachova sera Isabelle ?

C’est une artiste russe connue pour ses interprétations dans les célèbres opéras de belcanto, une soprano très drôle, qui fait une grande carrière internationale. La distribution est des plus brillantes avec un plateau de solistes qui se produisent sur les plus grandes scènes et l’ensemble Matheus que j’ai fondé, avec lequel j’explore des répertoires différents, un des orchestres qui a joué le plus d’œuvres de Rossini. 

Comment abordez-vous ce travail de chef, la direction musicale ?

Quand je dirige, j’essaie de travailler comme un directeur d’acteurs, appuyé sur la situation dramaturgique. Les émotions influent sur la musique et l’interprétation. On ressent une empathie pour les personnages qui deviennent finalement de véritables personnes. Cet opéra est un moment qui mêle avec brio joie, fantaisie et absurdité. C’est une grâce, car en ce moment, on a besoin de sourire, de générer les âmes, les gens qu’il faut soutenir dans ces traversées de chaos.
Rossini est passé maître dans cet apport-là. Il produit une œuvre dans un genre très compliqué. J’ai pu diriger des opéras dramatiques parfaits comme Otello mais il est injustement critiqué, même aujourd’hui, pour le genre opéra buffa. Pourtant, il fait rire de bon cœur et l’humour, versant musical, est une des choses les plus difficiles à mettre en partition. Cette musique n’a pas pris une ride. Géniale est sa drôlerie universelle, doublée de précision, d’énergie, de grâce, de poésie. N’est-ce pas rare, en effet, de pouvoir marier si parfaitement des éléments de poésie et de drôlerie qui pourraient paraitre si antagonistes ? Cette œuvre possède en ce sens, justement dans cette paradoxale association, un charme fou.
Je travaille avec une approche des plus précises du théâtre de Rossini pour arriver à son objectif émotionnel. De l’horlogerie mise en notes.  Les livrets sont remarquables, de superbes pièces d’orfèvrerie. La recherche instrumentale est une partie importante des nombreuses investigations menées et du profond investissement que l’on accorde à cette recherche.
Oui, il faut avoir le duende musical avec Rossini et beaucoup de fureur, pour déclencher autant de sourires et d’amour.

« L’Italienne à Alger » de Gioachino Rossini, dans la cour du Duché d’Uzès, jeudi 21 juillet à 21h30.

Propos recueillis par MJ.L

Pour en savoir plus sur les Nuits musicales d’Uzès, retrouvez notre présentation de la 51ᵉ édition. 

Plus d’informations : nuitsmusicalesuzes.com

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