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Céret : au musée d’art moderne de Céret, découvrez la « Mémoire tissée » de Teresa Lanceta jusqu’au 2 juin

1 Mar 2024 | Expos, Musées, Pyrénées-Orientales

En invitant, jusqu’au 2 juin, la Barcelonaise Teresa Lanceta dans son espace considérablement élargi, le musée d’art moderne de Céret rappelle son inscription dans la Catalogne méditerranéenne, sa situation frontalière, tout en concourant à la parité dans l’équilibre des sexes qui caractérise notre époque de résilience, comme on dit aujourd’hui.

Ceci dit il ne s’agit surtout pas d’un repli vers un régionalisme narcissique, il s’en faut. L’œuvre de Teresa Lanceta interroge les us et coutumes marginalisés, venus d’ailleurs et cherche à explorer qui les rend universels. Son intérêt pour la tapisserie prouve qu’elle est capable à la fois de remonter le temps, de revendiquer une activité qui relève autant de l’artisanat que de l’art des élites, qui choisit l’anonymat d’une création plutôt que la célébration des égos, et de relier ainsi l’art et la vie. La modestie, l’humilité plutôt que l’individualisme forcené. Elle met en exergue la mémoire, qu’il convient de prolonger, et de transmettre un savoir-faire ancestral. Cette exposition est conçue comme un parcours chronologique et thématique qui tient compte des différentes disciplines par lesquelles s’exprime l’artiste : tissage, dessins, peinture, vidéo etc.

Elle est découpée en cinq étapes. La première s’articule autour d’un Dialogue avec le Maroc, où Teresa Lanceta a découvert de quoi orienter définitivement sa carrière dans les années 80. Les récits berbères en particulier, la technique des tisserandes, les motifs dominants, abstraits, ont interpellé Teresa Lanceta, guidée par l’ethnologue et collectionneur Bert Flint à qui elle dédie une série de sept tapisseries. Celles-ci sont imposantes et ont l’avantage sur le tableau de pouvoir se plier aux sollicitations de l’espace : suspendues, accumulées, posées au sol comme des tapis, etc. Elles s’avèrent autant picturales que plastiques avec de surcroît l’idée qu’un objet utilitaire peut adopter une fonction esthétique. On reconnaît des gestes et intentions proches de Supports-Surfaces dont le musée de Céret se sent si proche, ce que ne montrent que mieux les riches Collections. Toutefois, Teresa Lanceta accorde une grande importance à la force et la vibration des couleurs vives ; elle ne se soumet point aux exigences de la symétrie et utilise sans doute le grand format dans l’intention de montrer la puissance écrasante du passé ou de la tradition, bien supérieure à nos petites et brèves existences.

La deuxième partie s’intitule Couture-Suture et caractérise les années 90. Elle se focalise sur le tableau, sur l’émergence de signes et sur la transparence de la surface. L’artiste s’adonne aussi au dessin en traitant notamment de l’enfance pour ce qu’elle recèle d’innocence et de fragilité, de mélancolie aussi.

La troisième, Chaine et Trame, se penche sur la production vidéographique, laquelle rend hommage le métier à tisser et mêle les images, fixes ou en mouvement, de telle sorte que l’on pense à un tissage iconique.

La quatrième revient au tissu, laine et coton et se nomme Rythmes abstraits. Le damier, le triangle, le losange ou l’étoile se retrouvent ainsi à l’honneur. L’artiste introduit dans ces compositions de la céramique, autre activité longtemps mineure et depuis quelques temps réhabilitée.

Enfin l’exposition s’achève sur des œuvres récentes intitulées Compositions textiles, dont certaines inspirées par le quartier barcelonais d’El Raval. Cinq décennies d’usage et de déclinaison du tissu dans une perspective qui ne cache pas ses finalités écologiques en recourant à un matériau d’origine naturelle, sociales puisque les communautés sollicitées par l’artiste sont mises sur le même pied d’égalité que la sienne, et bien sûr politiques puisque l’artiste s’ouvre à toutes les richesses que nous apporte l’autre, l’étranger. Ou supposé tel car la culture gitane  fait partie intégrante de la culture espagnole de même que l’Afrique du nord lui a apporté sa physionomie multiculturelle que tout le monde vénère aujourd’hui.

Ne pas oublier pourtant que, dans le même temps, le musée célèbre le centenaire d’Antoni Tapies, déjà présenté deux fois, et concepteur du diptyque mural en lave émaillée qui attend le visiteur dès le porche. L’occasion de re(découvrir) ce peintre catalan majeur dont les signes, de croix multiples, intriguent, tout comme les gestes puissants et effets de matière sur des supports volontairement modestes, ou son intérêt pour la gravure, si déconsidérée jusqu’à ces derniers temps. Outre seize œuvres des années 80, marquées par l’usage du noir, on pourra y voir une sculpture gravée d’un cadran solaire ainsi qu’une composition sollicitant des anges tombés du ciel. Dans le style graphique et exigent qui fut souvent le sien.

BTN

Plus d’informations : musee-ceret.com

CatégoriesExpos | Musées | Pyrénées-Orientales

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