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Sigean : Mark Brusse, Nadia Lichtig, Muriel Valat-b pour l’exposition printanière du L.A.C.

4 Mai 2023 | Art & Expos, Aude, Expos

L’exposition de printemps du L.A.C. associe, jusqu’au 28 mai, un artiste hollandais, Mark Brusse, ce qui ne nous surprend pas de la part de la famille Moget, originaire des Pays-Bas, et deux artistes choisies par la galerie Lligat, de Perpignan, et que nous avons pu découvrir naguère en cette région : l’enseignante des Beaux-Arts, d’origine allemande, Nadia Lichtig (vue au Réservoir) mais qui fait une carrière internationale (Paris, Allemagne, Pays de l’Est, Canada…) et Muriel Valat-b (vue, outre Lligat, au Lieu multiple jusqu’au 22 avril), laquelle a séjourné et exposé à Berlin.

Le premier était déjà connu dans les années 60 pour ses rapports étroits avec Fluxus et pour ses assemblages de bois et de métaux trouvés. Pourtant, au fil de ses voyages, sa mythologie personnelle s’enrichit, diverses figures apparaissent et la peinture finit par s’imposer. Elle a la particularité de s’appuyer sur une fraîcheur enfantine qui ne manque pas d’humour ainsi que le prouvent les divers nuages, anthropomorphes, et lapins, qui meublent ses papiers marouflés ou ses tableaux. Ou ses masques à trous effectués dans la matière, pour ses céramiques murales. Mark Brusse aime associer, comme par le passé, des éléments en apparence incompatibles : une main et la mer, une île, une embarcation, avec des échelles différentes. Il se rapproche alors d’un certain surréalisme, celui de l’inquiétante étrangeté. Les couleurs sont douces, rassurantes, peu nombreuses : Brusse aspire à la simplicité. Le thème de l’arbre est souvent représenté, après tout c’est de lui qu’est parti Mondrian pour élaborer sa célèbre abstraction ultérieure, et il a la particularité de relier deux inconnus : le sous-sol et le ciel. Il en est de même des volcans, célestes et chtoniens à la fois. Le support est délicat ainsi qu’il sied à l’Extrême-Orient. On entre dans l’univers d’un éternel jeune homme et qui apporte un peu de recul aux soucis du quotidien. Ses œuvres ont la légèreté des plumes ou d’un oiseau. Et s’élèvent jusqu’à l’universel.

Les deux artistes présentées par la galerie Lligat sont reliées par le Temps filaire. Et il est certain que l’idée de temps les associe, leur travail supposant des stratifications temporelles. C’est évident pour Muriel Valat-b qui se sert de points de couture et de broderie formant comme des îlots, ou des serpents de couleurs, sur les multiples tissus, récupérés ou souillés, qui leur servent de support. Ces interventions font penser à une écriture manuelle d’avant le langage et se prêtent ainsi à de multiples significations. Elles inscrivent la fragilité dans la matière, contre toute tentative de figer le réel dans un cadre rassurant qui relèverait de la vanité, et visent à susciter autrement le vécu textile que l’on s’est approprié. Elles tendent à s’élever, à la manière de statuettes parfois à silhouette humaine, grâce à des tiges de fer. L’artiste recourt enfin aux éléments du féminin, dans une entreprise binaire qui n’a pas de fin, telle une héroïne antique qui trouverait dans la broderie un moyen d’émancipation et de revendication consentie, et non rendu obligatoire par les circonstances extérieures (et viriles).

Nadia Lichtig se réfère souvent aux fantômes du réel et ses peintures ou papiers maculés ont ce côté nébuleux ou atmosphérique qui peut faire penser à une altération radicale de la réalité et de sa matière, vidée de son apparence. Celle-là est réduite en poussière ou poudre, à savoir désincarnée. C’est qu’il faut désintégrer si l’on veut ressusciter en prenant d’autres formes, celle du pictural notamment. On l’a vue ainsi se concentrer sur des lieux de crime ou de violence et procéder par frottage afin de restituer des empreintes du passé, sur du papier lui-même un vécu. Ses paysages abstraits sont un peu l’envers du romantisme. Ils sont chargés d’histoire, de récits traumatisants, d’héritage familial. L’écriture, qu’elle se plaît à effacer afin de rendre visible une nouvelle réalité graphique ou picturale, est une obsession et souvent un préalable dans cette production qui prend souvent les allures d’un palimpseste. Tantôt au sol, tantôt aux murs, souvent accompagnées du son, les œuvres de Nadia Lichtig sont comme un fragment d’infini arraché au réel, reterritorialisé et restitué à la mémoire collective. Et qui semblent en souffrance d’un son, d’une parole, d’une performance. Avec la Hollande, l’Allemagne et Berlin, le L.A.C. ne perd pas le Nord. C’est le moins que l’on puisse dire.

BTN

Plus d’informations : lac-narbonne.art

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