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Gilbert and Georges, Pipilotti Rist à la Fondation Luma à Arles jusqu’au 6 janvier

15 Oct 2018 | Expos, Expos

Arles est une ville qui gagne à être redécouverte, pas seulement pour ses monuments antiques et son patrimoine historique mais aussi, outre les Journées de la photographie, pour la qualité de ses lieux d’art fabuleux que sont la Fondation Van Gogh, le Musée Réattu et bien évidemment la Fondation Luma. Avec sa tour encore inachevée et déjà célèbre. Cet été, c’est un célèbre duo d’artistes, reconnus depuis les années 70, qui se retrouve à l’honneur dans l’immense entrepôt voué naguère à la mécanique générale, sise en le parc des ateliers. Gilbert et Georges ont fait de leur corps respectif, et toujours en duo, une œuvre d’art, ce qui est la définition même du dandysme, lequel nous vient justement de Grande Bretagne. Ils sont d’ailleurs vêtus en général de manière stricte, convaincus que se présenter aux regards suppose un certain respect du public, sans doute aussi pour ne point abuser des ambiguïtés ou inconvénients de l’excentricité. Cela ne les empêche pas d’expérimenter le motif traditionnel du Nu dans une perspective militante et anticléricale. Et puis quoi, au bout de quelques années de pose convenue, on peut tout de même se lâcher ! L’exposition est impressionnante par la quantité de pièces répertoriées et qui permettent de suivre cette entité à deux têtes, des seventies à nos jours. Elle étonne également par la variété des thèmes abordés, à peu près ce qu’un individu, a fortiori deux, croise tout au long de sa vie dans ses rapports au monde extérieur. Ce qui frappe c’est que le tirage photographique, dans un premier temps, travaillé morceau après morceau, fragment encadré après fragment encadré, donne à présent une indéniable impression d’unité. L’image est en effet divisée en de multiples panneaux, ce qui fait penser à des vitraux, mais orthonormés, gigantesques et toujours protégés par du verre, ce qui n’en rehausse que mieux la valeur symbolique. Les couleurs, rares au début, sont de plus en plus rutilantes et décomplexées à l’image de notre duo, exhibant ses hantises, ses obsessions, ses désirs, ses luttes, de plus en plus ouvertes sur l’extérieur voire devenues universelles. Le corps petit à petit s’est détaché de la réalité pour accéder à sa sublimation murale. Il est devenu iconique, objet d’admiration, toujours dans un esprit d’équilibre sur l’image comme dans le découpage, assuré par la grille qui découpe chaque image. On est dans le monumental et de la sorte en situation d’humilité par rapport aux œuvres, on se sent immergé dans l’univers des deux artistes, un impressionnant parcours de 80 pièces formant cette rétrospective 1971-2016, intitulée The Great exhibition. Un autre aspect de leur travail est la fidélité, plus de 50 ans de vie commune certes mais pour une trajectoire unique et qui trouve vite son image de marque, ses modalités de présentation – les dates incluses dans l’œuvre en apportent la preuve. Fidélité aussi à leurs valeurs. Les deux artistes font tout de concert, la symétrie leur va comme un gant, et les titres, choisis avec soin, nous sont fournis, intégrant donc des mots, de plus en plus présents dans l’image.

Mais dans la grande halle, il ne faut surtout pas rater l’incroyable installation de Pipilotti Rist intitulée Pixels Forest. La vidéaste suisse a suspendu à des câbles plusieurs milliers de lampes en forme de coquille en résine. On est donc à l’intérieur d’un pénétrable labyrinthique, avec itinéraire balisé et nous faisons partie de l’œuvre. Il s’agit en effet d’une sorte de téléviseur dans lequel nous découvririons le monde merveilleux de la couleur dans un paysage fabuleux, telle la forêt de nos contes enfantins. Les couleurs sont changeantes, on est ainsi pris dans un décor mouvant, et l’obscurité d’une part, les murs tapissés de bleu d’autre part concourent à cet effet, tout comme le scintillement des lampes colorées ou la musique conçue pour cette œuvre. On est plongés dans un monde imaginaire dont les circonvolutions pourraient rappeler le fonctionnement du cerveau, lequel gère notre corps, cet opéra vivant dont parlait Rimbaud, qui réagit en conséquence. Une œuvre étonnante et prospective à habiter jusqu’au 4 nov seulement. Il en est de même pour la galerie de portraits de Lily Gavin, autour du film réalisé par Julian Schnabel sur Vincent Van Gogh, dont les relations à la ville d’Arles ne sont plus à démontrer. Il s’en faut. BTN

Jusqu’au 6 janvier à la Fondation Luma à Arles, parc des ateliers, 45, chemin des minimes. https://www.luma-arles.org/

CatégoriesExpos | Expos

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