Sélectionner une page

Expo : David Bioulès à l’Espace Dominique Bagouet à Montpellier

10 Mar 2020 | Expos, Expos

Les objets sont les compagnons fidèles, de nos activités comme de nos farnientes. Beaucoup sont humbles, se contentant de suivre les besoins de nos corps dans nos nécessités comme dans nos plaisirs. Ils exécutent leur tâche et puis on les oublie. Certains relèvent de nos identités, témoignent de nos goûts et de nos façons de personnaliser les orientations générales ; d’autres désignent le clan familial, la petite tribu humaine et cellule sociale.

David Bioulès a choisi deux d’entre eux dont l’un est perçu comme proche de la terre, un autre protégeant du soleil pour mieux nous faire profiter du ciel bleu. La chaussure et le parasol : tels sont les deux axes, partant les deux murs, selon lesquels l’artiste s’est approprié l’Espace Dominique Bagouet.

Côté chaussures, 22 au total, le support choisi est volontairement pauvre : du carton coloré, lequel va donner le fond et la façon dont l’objet par contraste ou nuance au premier plan. On constate d’une part que la chaussure, dépareillée, en général gauche, est démesurément agrandie, à hauteur d’homme pourrait-on dire ; d’autre part qu’elle nous fait à présent face du fait de son redressement mural ; ainsi David Bioulès la réhabilite-t-il.

Car chaque chaussure a son vécu, suppose un parcours qui se conjugue avec celui de son propriétaire dont elle est la partie pour le tout, ce qu’en rhétorique on nomme métonymie (ou synecdoque). Le peintre la nimbe de lumière en jouant sur les relations aux supports ou en leur ôtant de la substance picturale. Le médium est modeste lui aussi, le pastel. Elles incarnent la ville, lieu de parcours par excellence. Elles relèvent aussi d’une industrie, révélée par les mots intérieurs, ceux de la marque, choisie en principe par celui qui trouva jadis chaussure à son pied.

De l’autre côté, 11 parasols nous renvoient à la mer. Ils sont réduits à l’essentiel : des lignes marquantes, des couleurs, des formes directement appliquées sur le mur. David Bioulès recourt aux cordes et aux sangles. La couleur, le dessin et la forme forment une seule et même entité. Ils sont consubstantiellement liés. On pourrait presque parler de sainte trinité.

Les angles de vue sont diversifiés, on a même des visions aériennes. Ils emplissent le mur comme les parasols emplissent la plage, chacun désignant l’identité familiale ou tribale. Contrairement aux chaussures qui leur font face, ils semblent à échelle une. Ils sont essentiellement allusifs, à savoir que le visiteur doit reconstituer mentalement les parties manquantes.

Car le vide ici fait le plein, le mur devient le fond en même temps que le support, et sublime l’objet de sa blancheur immaculée. Ainsi ces choses, tirées de l’oubli acquièrent-ils une nouvelle identité, transfigurée, d’un côté par la peinture, de l’autre par le relief d’autres objets, ou si l’on préfère par le dessin mural.

Alors que Noël battait son plein, et son cortège de surconsommation pléthorique, il était bon de s’arrêter, en image fixe et gros plan, sur ses compagnons domestiques ou estivants. Et de montrer qu’eux comme nous-mêmes peuvent échapper aux méfaits de l’éphémère et aux injures du temps.

BTN

Jusqu’au 29 mars, Esplanade Charles de Gaulle à Montpellier.

Plus d’informations : tél. 04 67 63 42 78. montpellier.fr

CatégoriesExpos | Expos

0 commentaires

Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

A lire aussi