Le dernier récital de printemps de la saison des Nuis musicales d’Uzès, avant le lancement du festival d’été en juillet, était pure merveille. Le contre-ténor Philippe Jaroussky y était en parfaite complicité avec l’ensemble Matheus et le chef d’orchestre Jean-Christophe Spinosi, tous deux amis de longue date. Peu avant, Eric Desnoues, directeur artistique des Nuits musicales, ébauchait un bilan des plus positifs de la précédente saison (2022-2023), tout en annonçant le programme des concerts de juillet. Entretien.
Le public continue de répondre, avec enthousiasme, à cette saison automne-hiver-printemps ?
Oui, avec la qualité au rendez-vous, une saison piquée et parée de concerts forts, que ce soit le concert de piano à la bougie avec l’immense artiste Anne Queffélec – 500 personnes un soir de plein hiver, c’est formidable – que ce soit le Roberto Fonseca Trio, l’Hommage aux grandes dames du jazz, ou ce tout dernier concert de printemps, à guichets fermés, authentique pépite. Cette aventure saisonnière, tout en restant un challenge, était aussi un pari sur le suivi de la qualité, de la solidité musicale, sur laquelle je suis intransigeant. Il semble que nous soyons entrés dans une sorte d’équilibre numérique, avec un tracé musical à l’année, couronné par le festival de juillet. La salle de l’Ombrière est une manne, il est vrai, pour la proposition de saison. Il faut honorer cette belle construction en faisant vivre ce lieu, d’où l’inscription dans la saison qui s’avère des plus positives.
L’Ombrière a été le lieu choisi pour ces concerts saisonniers. Et pour le festival d’été ?
Trois lieux seront investis pour les sept concerts, entre le 20 et le 31 juillet dont un seul à l’Ombrière, le 22 juillet à 19h, pour entendre le Jeune Orchestre Baroque Européen, dirigé par Margaux Blanchard. Orchestre qui rassemble chaque année des artistes, étudiants en conservatoire de musique ou en voie de professionnalisation, un projet instrumental ou lyrique d’insertion européen, porté par les Ombres et les Nuits musicales d’Uzès. Sylvain Sastre et Margaux Blanchard auditionnent et sélectionnent les musiciens dans les départements de musique ancienne de haut niveaux et invitent les recrutés pendant une semaine à Uzès. Pour le concert, ces derniers touchent un cachet. L’an dernier, ils ont donné six concerts à Montpellier. Ce n’est donc pas un « one shot » mais des engagements un peu partout à la clé, après le passage à Uzès. À noter que les places du concert sont à 15 euros, donc très abordables.
« Je fonctionne à la subtile sensibilité de l’écoute »
Quels seront les autres lieux ?
La prépondérance est donnée à la cour du Duché, lieu emblématique du festival d’été, qui ouvrira sa cour à quatre grands moments musicaux : de la musique symphonique avec un Gala Mozart, de la musique symphonique (Beethoven, Mendelssohn), des concertos baroques (Bach) et à suivre avec intérêt, un récital de piano où se produira Irina Lankova, une artiste un peu secrète, pas encore très médiatisée, dont le talent rare mérite vraiment la découverte.
Retour vers un lieu déserté ces dernières années, pour cause de travaux, mais où le public a vécu de grandes heures musicales, la cour de l’Évêché qui accueillera deux concerts, du jazz très classieux avec un vibrant hommage à Duke Ellington et en clôture de juillet un trio de Jazz cubain, Rolando Luna au piano.
Comment opérez-vous vos choix ?
L’alternative est simple : être suiveur ou y aller au feeling. Je ne suis guère convaincu par les produits fabriqués des maisons de disques. Etant musicien, je fonctionne à la subtile sensibilité de l’écoute. Je regarde quels programmes me sont présentés par les artistes. Je conclue par des coups de cœur à partager avec le public. La saison 2023-2024 est des plus prometteuses. Elle commencera le 25 novembre avec Le carnaval des animaux, se poursuivra avec Le Messie de Haendel, chœur et orchestre de l’Opéra Royal dirigé par Gaetan Jarry, concert qui clôturera l’année.
2024 débutera avec un nouvel hommage aux grandes dames du jazz sous la Gospel experience de Pascal Horecka au piano et à la direction. Fera suite, un concert symphonique (Tchaïkovski, Mozart). La saison se terminera le 16 mars avec André Manoukian pour un hommage musical très appuyé et réussi : son dernier opus destiné à sa grand-mère où il a adjoint les voix des Balkanes, voix de femmes bulgares.
Le contexte actuel, difficile, est-il sujet d’inquiétude pour la saison et le festival ?
Le temps n’est heureusement plus suspendu comme lors du Covid et le patrimoine uzètien a retrouvé sa superbe. Le paysage en est changé depuis une reprise, qui heureusement n’a pas trainé. Évidemment, on a dû resserrer l’offre. Nous avons peu de subventions et la billetterie représente une grande partie du budget. L’impact sur la culture, musique incluse est sérieux. De grandes maisons comme l’Opéra de Lyon en sont victimes. Pour l’instant les Nuits Musicales tiennent la barre et la portée musicales. Alors, restons confiants dans la note : bleue, de tête ou de cœur !
Recueilli par MJ.L
Tout le programme des Nuits musicales d’Uzès, du 20 au 31 juillet : nuitsmusicalesuzes.com
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