Il est sain que l’art sorte un peu des sentiers battus, ne se limite plus aux métropoles aspirantes et se décentralise de sorte que les artistes soient confrontés à la réalité brute. C’est l’occasion aussi de vérifier que notre région est une véritable pépinière de talents qui enrichissent le territoire (de Canet-en-Roussillon à Nîmes en passant par Parahou, Roquebrun, Corneilhan, Béziers, Sète et Aniane…), et de fournir, hors les villes, des opportunités de les découvrir. De remarquer également des lieux qui comptent et persistent, contre vents et marées de foires. C’est ce que propose cette nouvelle édition du festival itinérant d’art contemporain FIAC’OCC qui, du 26 octobre au 3 novembre, rassemblera 40 artistes dans 10 lieux audois.
Le LAC de Sigean en particulier, et La Maison des arts de Bages prouvent, une fois encore, que l’on ne peut décidément plus se passer d’eux. Mais il existe d’autres espaces d’art, à Sigean, à Bages, voire au Peyrac-sur-mer, qui gagneront à être connus, d’autant que le panel des artistes sollicités ne se prive point de puiser dans le vivier de ceux qui ont su se faire un nom, sur ce territoire, dans la région et au-delà.
Nicolas Daubanes et sa poudre de fer aimantée, ou Philippe Domergue le magicien du montage photo, en sont la preuve incarnée, à la Galerie du Château (Sigean), où seront exposées aussi Séverine Péron, Mylène Frichti-Roux et Sarah Thiriet dont on apprécie l’étonnant plongeon sculptural (exposé au Lac). De même, les virtuoses du dessin que sont Julien Cassignol et Sylvain Fraysse, Salle des pénitents où les rejoint Océane Moussé. Proche de la nature, finlandaise, Carita Savolainen dévoile ses qualités de paysagiste à la Maison des Artisans, accompagnée d’Aline Filipp, tandis que le L.A.C s’offre un plateau royal : l’iconoclaste Fabien Boitard, l’art du faire et défaire de Patricia Stheeman, l’orfèvre du cadre dans le cadre Patrick Sauze, la polyvalente Valérie Du Chêné, l’écossaise Vanessa Notley enfin (et ses vestibules sculpturaux) dont certains sont des fidèles du lieu. S’y ajoutent la Marocaine Monia Kensoussi ou la Suisse Doris Schaepfer.
Mine de rien, la région s’internationalise et s’enrichit grâce aux artistes qui viennent s’y installer. À Bages, la galerie Latuvu s’octroie les services du peintre des tartans et des masques, Pierre Bendine-Boucar, ou de Nissrine Seffar, à la recherche de traces d’histoire, invitée naguère du camp de Rivesaltes. Auxquels s’ajoutent Didier Béquillard et ses « écrissures » au noir, dont on a pu voir une belle expo Galerie Lligat à Perpignan (l’occasion de saluer la mémoire de sa fondatrice, Valérie Jottreau qui vient de nous quitter prématurément) tout comme Muriel Valat-B et sa manière originale de repriser le temps. Nullepart bénéficie de la présence d’une colonie sétoise de qualité grâce aux présences d’Enna Chaton, de Cédric Torne (le couple de l’année : Les Chatorne, resplendissant de nudité picturale), d’Agnès Rosse, grâce à laquelle les zoos en peinture paraissent moins vides, ou de Claudie Dadu dont la chevelure n’en finit pas de surprendre. Ils sont rejoints par Nicolas Cussac, dont l’on vient de découvrir les tableaux intimistes au Château de Jau, par Stella Rinke qui se permet toutes les audaces relatives au corps, et par Venice Spescha qui propose une installation.
L’espace des Arts et Lettres prouve, une fois encore, l’importance des artistes de Sète sur le territoire, en présentant l’immense Jean Denant, aux ponts comme des miroirs, accompagné de Jihane Khélif (L.A.C ou Chapelle du Quartier Haut), l’une des chevilles ouvrières, avec Alexandre Gilibert, de l’association à l’origine de cet événement FIAC OCC, et qui explore les vertus du pastel.
La Maison des arts nous a toujours eu bon goût dans ses choix : ainsi de la joaillière du médicament, Jeanne Suspluglas, de la céleste et lunaire Paola di Prima ou du narbonnais Jean-Christophe Alix. L’atelier Spescha nous fait découvrir la géométrie variable selon Marieta Hoferer ou le Tchèque Michael Kukla, sa structure complexe, tout en rondeurs, à base de cagettes. Ou encore Florence Etienne, photographe du féminin sacré, les empreintes de vase de l’étang d’Herman Van Synghel, et la peinture qui se veut neutre, en bandes horizontales de Tony White. Enfin, l’atelier Stheeman, de Peyrac-sur-mer, rassemblera des multiples, documents et livres de ces artistes. Tous les genres sont représentés même si la peinture et le dessin se taillent la part du lion.
L’occasion d’effectuer un état des lieux, de s’appuyer sur de bonnes bases et d’affirmer notre fierté de vivre en région, du moins dans une région aussi dynamique que la nôtre, que ce genre d’initiative ne peut que renforcer. Longue vie au FIAC’OCC et à ses itinérances.
BTN