Salle plutôt intimiste, accompagnement limité à une basse et une batterie, une heure et demie sans la moindre pause : tout était réuni pour que le concert de Jean-Louis Murat au Rockstore se déroule dans la sobriété et l’empathie que suscite la proximité. Le public ne fut pas déçu même si on sentit le chanteur concentré sur son tour de chant, ses partitions, son jeu de guitare reconnaissable entre tous. En fait, on savait qu’il s’agissait pour lui de faire la promotion de son dernier disque, Il Francese, encensé par la critique mais, à l’instar des précédents quelque peu boudé par le public. Murat privilégia donc les morceaux qui passent aisément la barrière du studio pour s’essayer aux nécessités de la prestation publique (on pense à Achtung, Hold-up ou le magnifique Rendre l’âme). Mais il nous gratifia aussi de quelques fleurons de son répertoire, parfois empruntés à ses premiers CD, du temps de sa gloire (L’amour qui passe) ou du moins à ses anciens qui n’ont rien perdu de leur capacité de séduction et passent facilement la rampe du temps (Mousse noire, Les voyageurs perdus. Il neige – en rappel…). L’ensemble donne ainsi une impression de cohérence et de continuité. J.L Murat communique peu avec son public. Il n’a pas besoin de cela. La pureté de sa voix si particulière, si aisément reconnaissable et surtout sans la moindre défaillance suffit à maintenir la fascination. Les textes sont souvent inattendus, originaux, en décalage avec ce qui se produit en général et qui est censé être ingurgité sans effort de compréhension. Les textes de J.L Murat résistent à l’interprétation immédiate. Les mélodies sont en général superbes et soignées, l’artiste se permettant certaines modulations vocales que l’on sent authentiques et non préfabriquées. Le chanteur vit ce qu’il chante et montre ainsi qu’il demeure au plus près de ce monde qu’il a créé, quelque peu distinct du nôtre, si condamnable à certains égards. En jeans et bottes de cow-boy à l’âme fière CAD auvergnate, sa chemise sans cravates ni veste superflu, Murat donne l’impression d’avoir quitté inopinément quelque ferme afin de s’inviter dans le nôtre, mais pas de s’y mêler. On pense à un dandy rural qui condescendrait à nous entretenir du fruit de ses méditations poétiques mais refuserait nos règle, nos attendes dérisoires. Il demeure assis tout au long du concert, comme un qui serait venu chez chacun de nous, faire partager un moment d’intimité rare. C’est ce qui fait que ce chanteur, plus que tout autre, et justement parce qu’il ne rencontre pas la reconnaissance générale méritée, nous semble si attachant et ses réalisations si précieuses. BTN
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