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Sète : exposition « Lisières » à la Chapelle du Quartier-Haut jusqu’au 5 novembre

16 Oct 2023 | Arts plastiques, Expos, Hérault

Initiée par la structure associative A.T.E.N.A, résidence pour Femmes artistes européennes, l’exposition Lisières restitue les travaux 2020-2023 de cinq d’entre elles (une Italienne, une Allemande, une Grecque, une Japonaise et sa fondatrice, la Française Lise Chevalier), en résidence à Sète. Si les cinq intervenantes sont unies par l’écoféminisme, outre la thématique plurielle de la lisière (ou plutôt des lisières), elles divergent dans les modalités de présentation choisies. À voir jusqu’au 5 novembre à la Chapelle du Quartier-Haut à Sète. 

La performeuse Ulrike Bernard utilisant les mots sur étoffe de façon à favoriser la rencontre, Lise Chevalier recourant à la peinture sur papier et au triptyque végétal, Yuka Matsui à la calligraphie traditionnelle, Olympia Gauguet à la vidéo tandis que Kathrin Koster, outre le dessin, privilégie la poterie ancestrale qu’elle n’hésite pas à enraciner comme pour donner vie à la matière. Kristell Loquet montre bien, dans son texte de présentation, la relation que chaque artiste entretient avec la riche notion de Lisières, elle-même polyphonique : seuil à franchir chez l’une, orée forestière chez l’autre, interrogation sur l’au-delà pour une troisième, dualité montré/caché ou sec/ humide chez la quatrième, entre deux étendues aquatiques d’une part, entre figure et abstraction de l’autre pour la dernière.

Ulrike Bernard brode des mots sur tissu monumental : ouverture sur l’espace de l’ancienne chapelle, ils incitent au don et à la réception et conçoivent donc l’intervention artistique comme un échange, en principe équitable, ainsi que le prouve son usage du motif de la balance. Cette artiste ne cache point son engagement qui pourrait se résumer en la formule Giving.Talking avec, en filigrane, le sous-entendu Donner plus et moins Prendre. Solution somme toute aussi efficace en matière environnementale que sociale et affective.

Plonger dans l’univers de Lise Chevalier c’est accéder aux portes d’un rêve éveillé qui conjugue approche du réel sensible, accession à un espace mental d’ordre intime, et ouverture sur le mythe à la fois personnel et universel. Son immense triptyque nous immerge dans ce qu’elle intitule une Genèse végétale où toute la gamme des verts est déclinée comme autant d’effets de la lumière sur bon nombre de plantes autochtones, les plus dissimulées, celles que l’on ne recherche pas de prime abord. Il  y a chez elle une volonté de sublimer les petites choses et de les donner à voir, comme disait Eluard. De les faire émerger de l’ombre et du monde chtonien qui leur donne vie. Elle rejoint ainsi le mythe de Perséphone et nous offre l’utopie d’un printemps que l’on aimerait voir perdurer. L’engagement débouche sur l’espoir, pas sur l’aigreur.

Olympia Gauguet, travaillée par le deuil et la disparition, ne s’est point privée de rendre visite au Cimetière marin, jadis célébré par son illustre « résident » : Paul Valéry. Dans sa vidéo, elle mêle des images sétoises ou gréco-rhodiennes à celles d’autres lieux et activités, qu’il s’agisse de rites funéraires dansés, des propos d’un thanatopracteur ou d’une entreprise de pierre tombale. Passage d’une activité à l’autre sous la tutelle fédératrice de la vision artistique. Avec en arrière plan, la fragilité de nos projets humains face à l’inéluctabilité de nos destins individuels et collectifs, lesquels devraient nous inciter à la modestie, plutôt qu’à la Vanité.

À ce propos, Kathrin Koster nous invite à mieux nous situer, et au fond à nous régénérer, par la nouvelle union de la terre et de l’eau. Elle présente ainsi des jarres à vocation irrigatrice, enterrées afin de donner vie aux plantes. Et à elles-mêmes par la même occasion. À les regarder de plus près, on y décèle des parties du corps à reconstituer. C’est ainsi qu’Isis ressuscita Osiris (Soit L’eau, notre Terre). Cette évocation du corps morcelé, on la retrouve quelque peu dans les 36 vues du mont St Clair (on reconnaîtra la référence à Hokusai), réalisées au dessin avec des matériaux nippons (encre sumi, papier Washi, structure en bois…) par Yuka Matsui. A l’unité centripète du Mont, correspond la nécessité du déplacement corporel et donc la multiplicité des postures et cadrages. On a ainsi l’impression que les relations sont inversées, le Mont imposant sa pérenne majesté et nous renvoyant à notre finitude. Comme si c’est le Mont qui nous observait…

Les cinq travaux se rejoignent ainsi dans l’attention extrême portée à la Nature et dans la volonté d’esquisser des solutions à la mesure de l’humain dans ce qu’il a de fragile. Les Ed. Méridianes présenteront un portfolio collectif dont Pierre Manuel a le secret. L’idée de jardin, et son pendant la cabane, qui serait le microcosme de notre planète, a germé également dans le cerveau fertile des membres du Collectif. On peut en avoir un aperçu dans les locaux de la résidence sétoise, une école (Eugénie Cotton, mis à disposition par la ville de Sète), les travaux s’avérant visibles lors de la Journée Portes ouvertes, du côté du Château vert… Comme par hasard… Sachant que le vert est la couleur de l’Espérance…

BTN

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