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Rodez : les « Discrete series » de Pierrette Bloch exposées au musée Soulages jusqu’au 19 mai

23 Fév 2024 | Arts plastiques, Aveyron, Musées

Alors que se profile pour 2025 une rétrospective au MAMC de Saint-Etienne, on voit l’œuvre de Pierrette Bloch, l’amie peintre du couple Soulages, enfin accéder à une reconnaissance qui n’était que discrète de son vivant. Sans doute cette discrétion, tant de la personne que de l’œuvre, explique-t-elle en partie ce retard. Toujours est-il que cet hommage posthume, de la part du musée rhodanien voué à l’œuvre du maître, participe de cette redécouverte d’une œuvre pleine d’audace et de surprises. Une cinquantaine de pièces seront exposées, en sept ensembles cohérents, au musée Soulages de Rodez jusqu’au 19 mai.  Qu’il s’agisse des collages bleus de 1971 ou des expériences sur fil de crin des années 80, des dessins saturés (97) ou des dessins à gros points (96), des lignes d’encre de 95 ou des Pays d’écriture de 86 ou encore des travaux sur papier asiatique de 2006.

Comme on peut s’en apercevoir, il s’agit d’une œuvre sobre, minimale, aux moyens discrets, eux aussi, d’où le titre de l’exposition, emprunté à un poète américain : Discrete series. Le point, la ligne et leur extension forment un BA.Ba à partir duquel les combinaisons semblent infinies. Le point peut, en effet, s’avérer minuscule et reproduit des milliers de fois, saturer la surface, ou au contraire gagner en ampleur et flotter de son humble fierté en l’espace d’un petit format. Il peut se transformer en écriture abstraite et se déployer sur un support longitudinal, démesuré, qui semble n’exister que pour lui et se plier à l’intention scripturale. La relation à l’écriture est d’autant plus pertinente que l’artiste se limite principalement au noir et blanc (ou l’inverse), recourt à la fois à un travail manuel et se sert bien évidemment de l’encre. On a rapproché ce travail de Michaux mais celui-ci jouait sur la dimension fantasmagorique et n’était pas si loin d’un certain surréalisme.

Le tachisme de Pierrette Bloch semble plus radical et gagnerait à être perçu comme une alternative féministe à des tendances ayant marqué son temps : qu’il s’agisse de l’abstraction lyrique, de BMPT ou de Supports-Surfaces, notamment dans ses séries sur les mailles de crin.  Elle se situe dans l’informel, a fortiori dans le refus de la figure, et elle ne s’embarrassait pas non plus de géométrisation ni de all over. Les réserves de blanc sont omniprésentes. Ainsi sent-on dans sa démarche, un refus des couleurs tapageuses et un repli sur soi, sur des activités élémentaires, ce que prouve l’économie des outils, des mediums et des supports employés. Ses écritures constituaient des alphabets secrets, davantage visibles que lisibles, et intelligibles non dans leur occurrence, mais dans l’intention qui leur a donné jour. On peut ainsi parler d’enfance de l’art sur lequel l’adulte porte un regard étonné, sans doute attendri, peut-être un peu distancié. D

e l’enfance, Pierrette Bloch a conservé la faculté de découvrir, de se laisser surprendre et de s’enrichir de ses découvertes. C’est l’une des raisons pour lesquelles sa démarche est sérielle. Elle épuise les champs du possible et agit comme une musicienne apte à varier sur un thème. Regardons, en effet, les multiples possibilités qu’offre un maillage de crin associé à un fils de nylon. On pense à une portée et à une improvisation débridée, dans la sobriété du format s’entend. On a parlé aussi à son propos de poésie ; c’est que la poésie cherche à faire plutôt qu’à dire. Pierrette Bloch en a retenu la leçon. C’est le privilège des enfants plus ou moins sages, dont certains adultes parviennent à conserver intacte la capacité d’émerveillement.

BTN

Plus d’informations : musee-soulages-rodez.fr

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