Un évènement retentissant a lieu autour de l’artiste Jean Hugo : une triple exposition sur le territoire héraultais. Le musée Médard à Lunel accueillera En toute intimité : Jean Hugo et Lunel, du 19 juin au 22 septembre, le musée Fabre à Montpellier Jean Hugo, le regard magique, du 28 juin au 13 octobre, et le musée Paul Valéry à Sète Jean Hugo, entre ciel et terre, du 29 juin au 13 octobre. Chacun de ces musées s’est approprié une part de l’histoire de l’artiste, proposant ainsi trois parcours muséographiques indépendants et complémentaires.
Enfin notre région reconnaît la valeur et l’importance d’un artiste hors du commun qui aura marqué son siècle et pourrait bien donner du blé à moudre au suivant. Comment interpréter, en effet, son goût immodéré de la marche dans des paysages tels que l’on n’en voit plus, que le progrès a abimés ou fait disparaître à jamais ? Ces promenades autour de Lunel, une par jour, par cercles concentriques, il en sera question au musée Médard qui nous livre un Jean Hugo En toute intimité, sa vie au Mas de Fourques, des années 30 à sa disparition en 1984, les visites d’amis, son goût pour les beaux livres, des documents, lettres et objets, croquis et palettes. Le paysage sera célébré au musée Paul Valéry, Entre terre et ciel, autour d’une centaine d’œuvres et de bien des livres illustrés. Les salles temporaires du musée Fabre nous familiariseront avec Le regard magique de ce peintre qui a beaucoup collaboré, en tant que décorateur, à des mises en scène de théâtre et de cinéma (Jeanne d’Arc, de Dreyer). Comment aborder cette œuvre qui s’étale sur sept décennies, marquées par une volonté de simplifier la peinture, une exigence de pureté et un goût raffiné, quasiment d’orfèvre, pour les petits formats ? L’intimité plutôt que les présomptions du grandiose. Et comment la désigner ? L’un de ces tableaux les plus narratifs, L’imposteur est qualifié de postimpressionnisme, Le salon Blanc de fauve, Les métamorphoses ou St-Valentin de surréalisme, La table de jeu de cubisme… Enfin, Les trois chevaux, Ste-Anne, et La baie de Hyères... de style naïf, inspiré par son intérêt pour le primitivisme italien. Les catégories restrictives ne conviennent guère aux créateurs singuliers et libres. Mais à choisir, c’est l’art prétendu naïf qui lui convient le mieux. Il privilégie la forme simplifiée, mais à y regarder de plus près, sa façon de traiter les volumes, la juxtaposition des plans colorés, et bien évidemment la perspective, sont résolument modernes. Jean Hugo savait capter l’essence d’un paysage, d’une situation ou d’une coutume et lui attribuer une portée universelle en éliminant l’accessoire, et en traitant l’image de manière bidimensionnelle. La lumière du sud correspondait à sa soif de spiritualité et de confiance qui se devine dans la clarté et la sérénité se dégageant de ses peintures. Son primitivisme était savant, s’inscrivant en quelque sorte en contrepoint des courants de son époque. On a davantage besoin aujourd’hui des leçons discrètes de ce type d’amoureux de la nature, avant que ça ne devienne un poncif, que des donneurs de leçons tonitruantes et manifestes, engageant leurs congénères sur la voie de l’erreur historique alors que le présent est là qui ne demande qu’à être cueilli. C’est ce qu’a fait toute sa vie, sans pour autant se priver de contacts illustres, et sans quitter la vie publique, cet artiste que notre époque aurait tout intérêt à (re)découvrir. Ces trois expositions, qui associent trois musées, et pas des moindres, pourrait y contribuer.
BTN
Pour plus d’informations : museemedard.fr ; museefabre.fr ; museepaulvalery-sete.fr