Après Duprat et Pelen, c‘est au tour de Jean Denant de se confronter aux multiples objets du musée archéologique de Lattes.

Ainsi, son travail peut-il être considéré non seulement en lui-même, par rapport aux enjeux culturels et artistiques qu’il suppose mais aussi dans son rapport avec les signes de la présence humaine passée, et au-delà, dans les incidences métaphysiques que l’on peut y découvrir. Jean Denant est intervenu en quatre espaces précis des deux derniers étages.

D’abord avec l’installation composée de six stèles de béton, couronnées de maquettes et surplombées de néons mobiles, animés par un ventilateur. Les deux matériaux sollicités sont on ne peut plus urbains et modernistes, d’autant que le haut des stèles, qui jouent alors telles des socles, présente une cité miniature, dans son architecture moderne, barre et tour. On voit la distance parcourue depuis l’aube de l’humanité constructive, et le temps que matérialise au fond la hauteur de la stèle, justement à taille humaine.

La deuxième pièce peut jouer comme un incroyable trompe-l’œil. L’image en effet, d’un sous bois pénétré de lumière, est en fait sculpté à la gouge sur des panneaux bruts de contreplaqué basique. C’est en enlevant de la matière que Denant crée une image, où se devine l’imbrication de la ville et de la nature, la première reléguant la seconde à un lieu d’évasion. Le visiteur peut mesurer la différence avec l’état inverse qu’ont connu les hommes des débuts de l’histoire. La dimension de l’image est suffisamment imposante, un pan de mur, pour donner l’impression qu’elle nous invite à aller la voir de plus près, quitte à la pénétrer.

Un peu plus loin on a affaire à une œuvre au sol en polystyrène. Évidemment, on pense à un carré de fouilles archéologiques, d’autant que des dessins se chevauchent et juxtaposent sur la surface exhaussée. Des plans de maquettes ont été superposées sur le matériau blanc divisé en une multitude de parcelles, dont certaines se sont effondrées voire éloignées du bloc compact originel.

Il y a dans l’œuvre de Jean Denant cette volonté de détruire pour construire, de passer par dessus le passé pour favoriser l’essor vers l’avenir. Sans omettre le présent que concrétisent précisément ces pièces. Les mobiles de néon leur donnent la dimension inventive d’une lumière artificielle.

Enfin, une sorte de fresque de placoplâtre jouxte une ouverture sur le site proprement dit. Ici encore le matériau contemporain a été arraché, parfois avec violence, afin de laisser surgir, tel un fantôme rétinien, des images d’immeubles de la métropole toute proche, rives du Lez obligent. Du même coup, la notion de chantier, qui fédère la majeure partie du travail de Denant est ici parfaitement illustrée.

En même temps, il est question de transitoire dans le pérenne, et sans doute de la question problématique : quelle archéologie l’humain laissera-t-il aux temps futurs ? Le caractère physique des deux œuvres murales prouve qu’il passe encore par le corps et l’humain, pas seulement par l’image et le numérique. Intéressante combinaison de deux mondes qui s’interrogent mutuellement, sachant que les œuvres ont été réalisées pour le lieu, qu’elles habitent et remodèlent temporairement. Ce qui fait de l’œuvre de Denant un chantier permanent.

BTN

Jusqu’au 24 octobre, Site archéologique Lattara
390, Avenue de Pérols. Tél.04 67 99 77 20.