Le nom de Max Jacob revient souvent dès lors que l’on s’intéresse un tant soit peu à ces périodes particulièrement fécondes et qui vont du début du XXe siècle aux prémices de la Seconde Guerre mondiale. Pas au point encore de se voir publié dans le Panthéon des Lettres qu’est la collection de la Pléiade, mais au point qu’un téléfilm lui a été consacré en 2006, avec Jean-Claude Brialy interprétant le rôle de Monsieur Max. Son amitié avec Picasso ne faisait aucun doute même s’il s’est retrouvé bien seul, quand il fut déporté à Drancy, où il mourut parce que juif et homosexuel. Son œuvre la plus connue reste le recueil du Cornet à dés et l’on comprendra vite, en le parcourant, combien ce titre représente d’une part le caractère ludique de sa production, d’autre part ses relations avec le cubisme puisqu’un dé est un cube (et un cornet : un cylindre ou un cône).
Un Cubisme fantasque, c’est justement le titre de cet hommage à une personnalité attachante, au destin tragique. On connaît le rapport de la ville de Céret à la naissance du cubisme. On sait moins que Max Jacob y séjourna en 1913, avec Picasso et sa deuxième femme : Eva Gouel. Il y réalisa des dessins et des gouaches dans l’esprit de l’époque et de cette innovation cruciale pour l’histoire de l’art. L’exposition qui nous est proposée se déroule en six étapes : d’abord celle qui situe le statut de Max Jacob en tant que compagnon de route et premier soutien de Picasso, notamment lors de l’installation du maître dans cette habitation que Jacob désigna tel un Bateau-Lavoir. Des dessins d’époque, dont un directement sur le chapeau de Max Jacob, témoignent de la proximité du poète et du peintre. Ensuite la découverte d’un homme paradoxal et complexe, féru d’astrologie ou de numérologie puis converti au catholicisme à la suite d’une illumination. La visitation, L’adoration des mages, sont d’inspiration ouvertement chrétienne. On le découvre témoin privilégié et acteur de l’éclosion du cubisme ce qui permet de se familiariser avec son œuvre littéraire : le très cubiste Saint Matorel conçu avec Picasso, et des collaborations avec Derain, Juan Gris.
Le morceau de choix est réservé à son séjour à Céret de 1913, et aux gouaches et papiers collés qui en témoignent. Manifestement, les rues et maisons de la ville l’inspirent, de manière cubiste ou pas. Cette section est enrichie d’œuvres d’autres artistes ayant résidé en la ville, tels que Derain, Manolo, Kisling ou Herbin. Son goût assez sûr et diversifié pour les arts de la scène (musique, théâtre, cirque…) méritait une section. Le morceau de bravoure en est le Fou, de Picasso, ou sa propre vision de Medrano, des Acrobate et danseuse. Enfin, nous le retrouvons au cœur de la galaxie cubiste, avec des artistes qui ont fait son portrait. Le plus réussi est celui de Jean Metzinger mais il inspira d’autres artistes comme l’égérie d’Apollinaire (Jacob collabora aux Mamelles de Tirésias), Marie Laurencin, ou Celso Lagar. « M. Max offrait tous ses profils à chacun des deux partis comme autant de prismes géants », lit-on dans son recueil de poèmes en prose. Ajoutons-y la présence d’un Cocteau, de Modigliani, de la baronne d’Oettingen, son rôle dans l’élaboration du Banquet Braque, croqué par Marie Vassilieff ; et l’on se fera une idée de la richesse de la vie de ce poète essentiel de la Belle Époque et de l’entre-deux guerres. Et l’on constatera, une fois encore, la richesse du patrimoine cérétan. Dont témoignent par ailleurs les collections.
BTN
Pour plus d’informations : musee-ceret.com